Seasick Steve - You can't teach an old dog new tricks

Publié le par mamaindanstondisque

Je le guettais, je l'ai attendu pendant un mois, fébrilement téléchargé le jour de sa sortie, et puis... Et puis, le drame. C’est le cœur gros que je vous annonce aujourd’hui le décès prématuré du petit Seasick Steve, trop tôt disparu après une carrière discographique de sept courtes années. Bon, en même temps, depuis le bavard I starded out with nothing digne d’une production eighties (à tel point que je l'ai refourgué à un pigeon sur price minister), on se doutait un peu que ça n’allait pas durer. Notre jeune talent (70 ans tout de même !) avait pourtant redressé la barre avec Man from another Time voici deux ans, disque sympathique qui frisait carrément l’excellence (je dis « frisait » parce que Dog House Music constitue pour moi un sommet indépassable, plus efficace avec moins de moyens)… Mais là, c'est à se demander si l’ami Seasick n’a pas renoncé au Jack Daniel’s tant il semble avoir perdu son originalité et son talent sur le chemin du succès. Dieu sait pourtant si le bourbon lui a naguère inspiré quelques beaux moments, dont on ne trouve plus la moindre trace dans le disque poussif / pathétique / puant qu’il nous livre ici.

D’emblée, ça fait mal : un Treasures affecté, tout en chiantitude et cordes sirupeuses, qui réussit l’exploit d’endormir son auditeur dès la première minute. Vraiment, à la prochaine insomnie, je me le remets. Ce titre, certainement, se veut plein d’émotions qu’il préfère garder jalousement pour lui. En conséquence de quoi, son sinistre auteur, apparemment gêné par nos ronflements, va passer le reste du disque à tenter de nous réveiller. Pour cela, il déballe l’artillerie lourde : John Paul Jones, l’ex-batteur-claviériste de Led Zep’ (première erreur), est aux fûts. C’est peu dire qu’on l’entend : il écrase littéralement de tout le poids de ses percus aussi grotesques qu’inutiles la moitié de l’album. L’autre moitié, naturellement, c’est Seasick Steve qui joue de la guitare mais on se demande au final si ce n’est pas la guitare qui (se) joue de Seasick Steve… Cette cacophonie stérile ne confine pas au vulgaire, elle s’y enfonce comme en un endroit qui ne voit jamais le soleil. Et nous, on n'en voit pas la fin. You can’t teach old dog new tricks, l'imprononçable titre éponyme, s’attire nos bonnes grâces le temps de l’introduction (grandiloquente), puis retombe comme un soufflé. Du vent, je vous dis. C’est là le défaut majeur de l’album : il ne nous épargne ni le bruit ni l'odeur, à l'image de sa prod' qui pédale dans une fétide choucroute. Le drôle a voulu se la jouer gros bras (seconde erreur), mais dans le genre brutal et épais, le Sweet Tea amer de Buddy Guy se montrait autrement viril.

 

old-dog.jpgNoyez ce chien que je ne saurais voir !

 

Le riff pseudo-bluesy de Burnin’ up atterrit comme un cheveu dans la soupe au milieu d'un tel bordel. Même les moments apparemment plus dépouillés, tels que Have Mercy on the Lonely n’atteignent pas, faute d’inspiration, la cheville des ballades des précédents opus. Où sont passés les vapeurs bourbonnées et le tiède parfum de boue des rives du Mississippi ? Dans quel pétrin froid et mercantile notre ami est-il allé se fourrer ? Dog House Music auquel voudrait bien se référer l’affreux Back in the doghouse, qui ferait mieux de s’abstenir d’auto-citation tant on est loin, tristement loin du boogie endiablé, achève d’enterrer nos illusions. La déception passée, on s'agace : Seasick Steve, criard, en fait des tonnes, sort les muscles et ce n’est pas beau à regarder (forcément, à son âge…) Faussement hystérique, terriblement vain et lisse, ce morceau navrant agit comme la goutte d’eau dans le vase de notre ennui. Encore un truc comme ça, mon pote, et tu prends la porte.
Soudain, Underneath a blue and cloudless sky laisse espérer une éclaircie : ah, ça démarre plutôt pas mal. Ah, ça sonne roots, la voix est plus cassée… Ah, merde, la fin radote. Dommage. Du coup, les « oooh ooooh » ridicules du risible et interminable What a way to go dépassent les bornes de l’insurmontable. Le mec a manifestement passé les deux dernières années à écouter les pires daubes estampillées blues ou rock pour les recycler dans son album, que je m'en vais promptement glisser dans la corbeille avant qu'il ne répande ses nauséabonds relents dans tout mon disque dur.
Certains critiques mal informés ont pu déceler dans Old dog un chant incantatoire dont je me demande bien où ils l’ont péché. M’est avis qu’ils n’ont pas vérifié le sens de ce mot à l'écoute de RL Burnside ou John Lee Hooker, qui pour le coup en connaissaient un rayon en matière d’incantations. Ils y ont également flairé « l’odeur des champs de coton », mais personnellement, ce n’est pas ce que je renifle quand je me penche sur pareil tas de bouses. Le blues, décidément, traverse des heures difficiles – et nous avec. Rendons-nous à l'évidence : Seasick est mort ; souhaitons-lui une résurrection prochaine, mais tel qu’il est parti, je ne serais guère étonné qu’il enchaîne sur un duo avec Poppa Chubby...

Ps : mention spéciale à Whiskey ballad ponctuée de sadiques sifflements. Clair que quand on s'est infligé ce condensé de mauvais goût, il ne nous reste plus qu'à boire pour oublier !

Oyster

(merci aux tauliers pour les clés !)

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S
<br /> J’avais découvert fugitivement et avec bonheur Steve Seasick avec la Blogothèque et les Concerts à emporter.<br /> <br /> <br />
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O
<br /> Mea culpa, je me suis bêtement emmêlé les pinceaux.<br /> J'ignore qui est derrière cette batterie tapageuse alors.<br /> <br /> <br />
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E
<br /> Petit détail sans importance... Jones était bassiste au sein de Led Zep, et non batteur.<br /> <br /> <br />
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